Ji Soo remarque rapidement le sourire crispé de David qui lui indique que lui-même n'est sans doute pas très confiant concernant son petit manège qui laisse tout le monde surpris. Lui-même affiche un sourire amusé qui n'aide pas à détendre l'atmosphère légèrement tendue. Il disparaît pourtant rapidement alors que le coréen hausse les sourcils en entendant son professeur admettre qu'ils ont plus qu'une simple relatino professeur-étudiant. Qu'essayait-il d'insinuer? Allait-il révéler devant tous ces professionnels les menaces que lui avait fait Ji Soo? Il en doutait, il se mettrait dans l'eau chaude également. Pourtant, de sous-entendre qu'ils sont plus proches que nécessaires ne serait pas très prudent non plus. Le monde littéraire peut se montrer très conservateur, surtout lorsqu'il s'agit de ce genre de relations, est particulièrement entre deux hommes. Ainsi, David était prêt à perdre sa réputation pour se débarrasser de lui puisque, évidemment, en admettant un lien affectif entre eux, il serait mal vu de poursuivre la direction de son mémoire.

Alors que Ji Soo est encore sous le choc, le professeur se rapproche de lui à nouveau, poussant la comédie jusqu'au bout. Il sent son coeur battre plus rapidement, sans doute par nervosité, alors que David annonce avoir besoin de passer à la salle de bain. Enfin, le coréen a l'impression de pouvoir respirer un peu mieux lorsqu'ils s'éloignent du groupe d'hommes qui les regarde toujours avec un mélange de surprise et d'incrédulité.

Une fois assuré qu'ils sont assez loin, Ji Soo tire sans ménagement le bras intact de David pour l'obliger à se tourner vers lui, fronçant les sourcils.

À quoi tu joues? Tu essaies de me piéger? Bien essayé mais...

Un sourire apparaît finalement sur son visage:

Si tu veux vraiment prendre cette direction, alors tu devras jouer le jeu jusqu'au bout.

Sans se soucier des quelques personnes qui circulent autoru d'eux, l'étudiant glisse une main sur la nuque de David pour approcher son visage du sien et pose ses lèvres contre les siennes comme s'ils en étaient déjà à leur énième baiser.

Sa réaction ne se fait pas attendre et je crois que rien n’aurait pu m’y préparer. En fait, je m’étais attendu à tout sauf à ça car ce n’est pas vraiment une scène que Jisoo me fait. Non c’est tout autre chose bien qu’il manifeste malgré tout un certain mécontentement. Je crois que j’aurais préféré qu’il continue à se plaindre et à me faire des reproches mais au lieu de ça, il glisse sa main derrière ma nuque et presse ses lèvres contre les miennes. Sur le moment, je ne réagis pas. Je suis bien trop surpris pour ça. Non je dirais plutôt stupéfait, sous le choc… je ne sais pas très bien ce qui convient de dire mais une chose est sûre, c’est que je ne le repousse pas. Dans un sens, je me console en me disant que c’est une bonne chose. Cela n’apporte qu’un peu plus de crédibilité à ce que j’ai laissé entendre mais avais-je envie que toute la salle le sache ? Avais-je vraiment envie que nous allions aussi loin ? Même si apparemment nous avons déjà passé une nuit ensemble mais plus le temps passe, plus j’ai des doutes sur ce que nous avons vraiment fait ensemble. En revanche, ce baiser, même chaste est bien réel malheureusement je n’ai pas le temps de m’y attarder car quelqu’un de bien plus gênant et dangereux que Jisoo m’a confié une mission et si je ne l’accomplis pas ce soir, c’est plus que ma carrière que je risque.

Est-ce que j’ai aimé sentir ses lèvres sur les miennes ? Là n’est pas la question. Il n’est pas non plus utile de savoir si ça a fait ou pas réagir mon corps. Le plus important est qu’une fois cette petite mascarade terminée, je passe mon bras valide autour des épaules de Jisoo et sans un mot, je l’entraine hors de la salle de réception. Il y a mille et une chose que j’aimerais lui dire à commencer par lui interdire de recommencer mais dans un sens, il nous a peut-être rendu service sans le savoir.
« Viens ne perdons pas de temps et ne fais pas de bruit s’il te plait. »
Je ne tiens pas à m’étendre sur ce qui vient de se passer et je doute qu’après ça, quelqu’un cherche à savoir où nous nous rendons. J’ai d’ailleurs le cœur qui bat la chamade dans ma poitrine mais je suis persuadé que c’est à cause de ce qu’on va faire. D’ailleurs sans un mot de plus, j’entraine Jisoo vers un escalier qui mène à l’étage. Puisqu’il y a une réception, l’alarme de la mairie n’a pas encore été activée et pour connaitre les lieux, je sais que le bureau du maire n’est plus très loin. C’est notre destination finale et j’espère qu’on ne croisera personne sur la route. Si ça devait arriver et bien je n’aurais plus qu’à rendre à Jisoo son précédent baiser et nous faire passer pour des amants en quête d’un endroit tranquille. Cette idée ne m’enchante pas mais ce n’est pas comme si j’avais vraiment le choix.

Ji Soo se doutait bien que David ne pouvait pas le repousser. Ça nuirait à cette petite mise en scène qu'il avait dirigé un peu plus tôt et c'est pour cette raison que le coréen en profite. Son envie lui vient certainement de son désir de déstabiliser l'homme à son tour qui avait peut-être cru avoir repris le dessus sur lui lors de cette conversation improvisée. Il devait pourtant se rendre à l'évidence, Ji Soo était le maître du jeu. Du moins, il n'avait pas l'intention de se laisser détrôner si rapidement et facilement.

Le professeur semble surpris par ce baiser - avec raison - et même si le coréen ne s'y attarde pas aussi longtemps qu'il l'aurait souhaité, il se doute bien qu'ils en ont tout les deux profité. C'était bien la première fois qu'il embrassait un professeur mais pas la première fois qu'il s'adonnait à ce genre d'activité avec un homme prétendant être hétérosexuel. Et quelque chose lui dit que David ne s'attardera pas très longtemps à cette préférence.

Une fois le baiser rompu, l'homme passe son bras valide utour des épaules de Ji Soo pour l'entraîner plus loin. Pour l'engueuler peut-être? Un sourire amusé se dessine sur les lèvres du coréen qui ne résiste pas. À sa grande surprise, David ne mentionne pas le baiser et agit plutôt comme s'ils étaient en mission. À moins que ce baiser ait réveillé un désir quelconque en lui faisant en sorte qu'il ne pouvait pas attendre plus longtemps avant de s'isoler avec Ji Soo. Ils prennent un escalier et l'étudiant s'arrête aussitôt, retenant David par le bras.

On va où comme ça? Si tu cherches un endroit plus intime on a qu'à rentrer. Je ne savais pas que tu étais du genre si impatient. Mais je pense que tu n'as pas terminé de me présenter à tous tes contacts.

Jisoo me retient par le bras et je lui adresse aussitôt un regard surpris qui trouve rapidement ses réponses lorsqu’il prend la parole. Sans rien dire, je me défais doucement de sa main avant de la serrer dans la mienne, le tirant ensuite vers moi avant de lui murmurer tout près de son visage :
« J’aurais bien assez de temps pour te présenter le reste de mes contacts mais avant ça, j’ai quelque chose à faire et j’ai besoin de toi. »
Mon cœur bat à cent à l’heure mais j’ignore si c’est à cause de notre proximité ou de ce que je m’apprête à faire. Dans tous les cas, je resserre mes doigts sur ceux de Jisoo et l’entraine à nouveau vers l’étage. Après avoir vérifié que la voie était libre, je lui reprends à voix basse :
« Je dois simplement laisser un message dans le bureau du maire. »
Et avec un peu de chance la porte ne sera pas verrouillée. En tout cas pour le moment il n’y a personne dans les couloirs et nous arrivons sans encombre devant une double porte menant au bureau du maire. Je lâche finalement la main de Jisoo pour presser la poignée, partagé entre l’envie qu’elle soit verrouillée et celle qu’elle puisse être ouverte.

La porte s’ouvre sur un bureau particulièrement spacieux. Il fait sombre et j’y entre le premier, faisant signe à Jisoo de me suivre.
« Entre et referme derrière toi. Sinon va m’attendre dans la voiture, je me débrouillerais mais je vais avoir besoin du paquet. »
Dans l’idéal, compte tenu de mon état, j’aurais quand même besoin de son aide au moins pour ouvrir le paquet sans mettre du papier cadeau partout. Ce que ce cadeau empoisonné contient ? Des bombes de peintures pour que nous puissions vandaliser le bureau et ainsi adresser un message au maire de la part de quelqu’un que je ne contrarierais sous aucun prétexte.

Jisoo décide de rester. Parfait, le voilà complice de vandalisme. Je n’aime pas l’idée de le mêler à ça. Il n’est pas ce qu’on peut qualifier de fiable. Après tout, il me fait déjà chanter mais j’imagine qu’en se compromettant de cette façon avec moi, il se retrouve lui aussi piégé. Lorsqu’il a terminé de déballer le paquet, je lui prends l’une des bombes de peinture des mains et commence à me mettre à l’ouvrage.
« Tu peux sois m’aider, soit attendre que j’ai terminé mais ne me demande pourquoi je fais ça. Tu peux aussi me dénoncer mais dans ce cas, tu perdras le peu de confiance que je t’accorde. Et n’est-ce pas une belle preuve de confiance que de t’impliquer dans cette histoire ? Nous voilà toi et moi unis dans le crime. C’est presque romantique ! »
Je laisse échapper un léger rire nerveux tout en commençant à me mettre à l’ouvrage, me demandant au passage comment j’ai pu me retrouver dans une telle situation. D’ailleurs je finis par ajouter :
« Si tu me promets de ne pas essayer d’en savoir plus, alors je ferais ce que tu voudras. On retournera dans la salle de réception pour que je te présente aux autres… »
Quoique… j’ai bien peur que l’odeur de peinture n’imprègne nos habits, nous désignant ainsi coupable pour cet acte de vandalisme.
« Ou alors on pourra rentrer chez moi. On s’ouvrira une bouteille de ce que tu voudras et on travaillera sur ton manuscrit ou sur ce qui te chantera. »
Au point où j’en suis réduit ce soir, j’ai seulement hâte d’en finir et de rentrer.

Ji Soo se doute bien que, s'il donne un coup de main à David, il risque de se mettre dans une situation délicate et il serait incapable de faire chanter davantage l'homme. D'ailleurs, même s'il ne l'aide pas, si son professeur se fait prendre, il y a suffisament de témoins qui les ont vu ensemble pour se douter qu'il était sans doute en sa compagnie lors des faits. LE coréen pousse un profond soupire à cette pensée et éteint la caméra de son téléphone. Bien sûr, il pourrait le dénoncer et effacer tous les doutes qu'on pourrait avoir quant à son implication, mais ça ruinerait ce qu'il avait déjà mis en place auparavant.

Oh alors nous en sommes au romantisme?

Un sourire en coin apparaît sur son visage. De toute façon, il est beaucoup trop curieux de voir ce que David a l'intention de faire pour retourner l'attendre gentiment dans la voiture.

Tu sais que même sans cet acte de vandalisme, tu dois déjà te soumettre un minimum à ma volonté. Je te rapelle que je possède deux ou trois trucs qui pourraient ruiner plusieurs aspects de sa vie.

Sa carrière en étant un, mais oubliait-il ses filles? Comment réagiraient-elles, ainsi que son ex femme, si elles apprenaient qu'il avait une affaire avec un étudiant? Et si Ji Soo l'accusait d'abus de pouvoir, cette relation prenait un tout autre aspect.

Ce sera plus sage de rentrer, en effet.

Il croise les bras sur sa poitrine, attendant que David s'active pour faire ce qu'il avait à faire.

Je ne poserais pas de question mais dans ce cas, je ne ferais qu'observer. Pourquoi est-ce que je me compromettrais si je ne sais même pas ce qui te pousse à agir de la sorte. 

Je ne sais pas pourquoi j’ai utilisé le mot romantique mais on dirait que ça lui plait, tout comme l’idée d’avoir un peu plus l’ascendant sur moi. De mon côté, au point où j’en suis, un peu plus ou un peu moins, ça ne change pas grand-chose.
« Il y a une différence entre faire quelque chose sous la contrainte et le faire volontairement. N’est-ce pas plus intéressant pour toi que je te consacre ma soirée, voir même ma nuit, de mon plein grès ? »
Devoir faire ce que j’ai à faire avec un seul bras n’est pas simple et c’est justement pour cette raison que j’ai choisi d’utiliser des bombes de peintures. Une pression et voilà la peinture qui s’étale sur les murs et le bureau de notre très cher maire. L’odeur m’agresse un peu les narines mais je me dépêche de finir ma tache avant de rejoindre Jisoo qui m’attend sagement. Je lui tends la bombe pour qu’il la range dans le sac et c’est à ce moment là que je remarque que j’ai tâché l’une des manches de ma veste.
« Aide-moi à l’enlever s’il te plait. »
Après une courte réflexion, je défais également ma cravate et lui dit :
« Les premiers boutons s’il te plait. Deux devraient suffire. »
Ainsi les gens penseront que nous avons pris du bon temps, pas que j’ai tâché ma veste en vandalisant le bureau du maire. D’ailleurs je vais devoir la tenir à la main ainsi que ma cravate mais ce n’est qu’un détail.
« Je te laisse vérifier que la voie est libre. Ensuite on rentrera chez moi et on fera ce que tu voudras. »
On travaillera sur son mémoire ou sur un manuscrit quelconque. Peu m’importe ce qu’on fait tant que je peux prendre une douche et prendre un verre pour oublier ce que j’ai été obligé de faire.

Ji Soo l'observe, toujours avec son éternel sourire en coin, peu convaincu par ses paroles. Était-ce réellement de son propre gré? Après tout, s'il n'était pas question de tout le chantage qu'il avait mis en scène jusqu'à présent, David ne l'Aurait jamais invité à cette soirée et ne se tournerait certainement pas vers lui pour obtenir de l'aide.

Alors tu es d'accord, tout ce que tu fais pour moi n'est pas fait sous la contrainte?

Il croise les bras sur sa poitrine, observant le professeur se débrouiller avc les bombes de peinture. Hors de question de se salir les mains sans comprendre l'enjeu. L'odeur est forte et Ji Soo doute fortement que personne ne remarquera l'acte de vandalisme dans les prochaines minutes. Et si l'odeur les suivait? Si David, en ayant l'usage d'un seul bras, finissait par tâcher ses vêtements?  Heureusement, il termine rapidement et lui redonne la bombe que l'étudiant s'empresse de dissimuler sans le sac. Leurs regards respectifs s'attardent sur la veste de l'homme qui, comme Ji Soo l'avait craint. Surpris, il décide de l'aider à le retirer, comprenant finalement où il souhaitait en venir lorsqu'il défait sa cravate et lui demande à nouveau son aide pour déboutonner le haut de sa chemise.

Tu n'es vraiment plus à un scandal près...

Il  ne peut s'empêcher de rire avant de finalement entrouvrir lentement la porte pour vérifier si quelqu'un se trouvait à l'extérieur. Personne en vue, il fait donc signe à David de le rejoindre avant de s'éloigner du bureau, feignant l'indifférence.

Faire ce que je veux? Je ne suis pas certain que l'idée te plairait mais si tu insistes...

Oui je ne suis plus à un scandale près mais j’ose espérer être capable de maitriser une partie de l’histoire qui sera dévoilée au grand public tôt ou tard. Après tout, je suis romancier. C’est mon travail de poser les jalons d’une histoire. Et à choisir, mieux vaut être vu comme un imbécile qui est tombé amoureux d’un de ses étudiants plutôt que comme un vil prédateur coupable d’abus de pouvoir et d’harcèlement sexuel. De toute façon, ce n’est pas comme si feindre un amour pour Jisoo m’engageait à quoi que ce soit. Il connait la vérité et c’est tout ce qui compte. Alors je peux bien laisser les autres croire ce qu’ils veulent. Pour ça je suis même près à l’étreindre en public, surtout si ça ne l’empêche par la suite de me porter de fausse accusation, mais nous n’en sommes pas là. Pour l’heure, nous devons quitter ce bureau sans être vu et rentrer chez moi.

Dès que Jisoo me fait signe que la voie est libre, nous nous glissons hors du bureau vandalisé. Ma veste tachée est posée sur mon bras blessé, de sorte qu’on ne puisse pas voir les traces de peinture. Quant à ma main valide, je ne tarde pas à la refermer sur celle de Jisoo en déclarant :
« Je n’insiste pas, je suis juste réaliste. Nous voilà complice dans le crime mon cher Jisoo. Je me suis fait une raison. »
Plus je vais tenter de résister plus je vais me noyer. Alors la seule chose que je peux faire c’est d’attendre le bon moment pour agir. J’imagine que lorsqu’il arrivera, je saurais quoi faire. En attendant, veillons à ce que Jisoo ne puisse dire à personne qu’il n’était pas consentant. Que je puisse au moins sauver cette partie de ma réputation.
« Mais si tu trouves que la main, ça fait trop je te lâche. »
Est-ce que de mon côté ça me gêne ? Je ne suis plus à ça près. Et puis ce n’est pas comme si ça m’engageait à quoi que ce soit avec lui.

David a certainement une idée derrière la tête pour oser s'afficher avec lui devant ces gens connus et influents dans le monde dans lequel il baigne depuis toujours. Pourtant, Ji Soo ne craint absolument pas de se faire avoir à son propre piège. Il a plus d'un tour dans son sac et il est brillant, il saura toujours comment tirer avantage de chaque situation. C'est donc avec confiance qu'il laisse le professeur lui prendre la main, mettant ainsi fin aux doutes que pourraient avoir eu toutes personnes jusqu'à présent.

Complices? Je te rapelle que je me suis contenté d'être un simple témoin...

Un sourire se glisse malgré tout sur son visage, amusé à l'idée que David se pense peut-être plus en sécurité de cette façon. Ce n'est pas un simple grafiti dans le bureau du maire qui allait faire reculer Ji Soo même si l'incident l'amuse et le rend à la fois curieux. Son regard se pose brièvement sur leurs mains respectives en entendant la question du professeur, en profitant même pour l'attirer davantage pour lui.

Si tu veux que les gens nous croient ensemble, la main n'est qu'une première étape.

Après tout, ils étaient en France, pas en Corée ou dans un pays plus conservateur. C'est pour cette raison que Ji Soo relâche la main de David pour la glisser sur sa taille, le maintenant contre lui pour démontrer une plus grande proximité.

Un simple témoin ? Un témoin qui n’a pas réagi et qui ne m’a pas non plus dénoncé. Un témoin qui a fait le guet et qui me sert d’alibi. Alors non, j’appelle plutôt ça un complice passif mais il n’est pas utile de débattre sur ça immédiatement. Je n’ai pas envie de donner de nouvelles idées à Jisoo. Je veux juste qu’on s’en aille le plus loin d’ici sans se faire prendre. Pour le reste, je m’en fiche même si notre nouvelle proximité est surprenante voir malaisante. Lui tenir la main est une chose mais marcher si près l’un de l’autre, est-ce bien utile ?
« Tu ne crois pas qu’on en fait un peu trop ? »
Il ne manquerait plus qu’on s’embrasse et l’illusion serait parfaite mais je me garde bien de le lui dire même sur le ton de l’humour. Je crois que je ne suis pas encore prêt à aller si loin même pour sauver les apparences. Pourtant la proximité de Jisoo me gêne beaucoup moins que je ne l’aurais cru. Je commence peut-être à me faire une raison. Notre relation est spéciale mais surtout inévitable. Il me fait chanter et moi j’essaie de sauver les meubles comme je peux. S’il y a comme une sorte de lassitude et de défaitisme dans ma façon d’agir, je n’ai pour autant pas abandonné l’idée de me débarrasser de lui un jour ou l’autre. Je prends simplement mon mal en patience.

Nous redescendons au rez-de-chaussée et une fois dans le hall, nous croisons d’autres invités qui s’en vont eu aussi. Ils ne prêtent pas vraiment attention à la direction d’où nous venons. Notre proximité doit davantage les interpeler même si en France, c’est finalement quelque chose d’assez commun en dépit de notre différence d’âge. Notre statut aussi mais ça, il n’y a que ceux qui nous connaissent qui peuvent s’en offusquer. Un professeur et son étudiant, si on me l’avait dit un jour… Surtout un homme. Parfois je me demande ce que j’ai fait pour me retrouver dans une telle situation. Enfin je continue malgré tout à jouer le jeu jusqu’à ce que nous arrivions à ma voiture. Là je m’éloigne d’un pas et lui dit :
« Fais attention à ne pas y prendre goût, sinon tu pourrais être déçu. »
Ce qui s’est passé aujourd’hui ne se reproduira pas alors j’espère qu’il s’est bien amusé.
« Rentrons, je suis fatigué. »
A peine ai-je prononcé ces paroles que j’entends quelqu’un m’appeler par mon prénom. Je me retourne et découvre mon éditeur qui cours presque dans notre direction, un sourire aux lèvres. Il ne manquait plus que ça…

En faire trop? Alors que c'est David qui l'a invité dans cette soirée, mettant en évidence devant tous ces gens importants qu'il se passait clairement quelque chose entre eux allant au-delà d'une simple relation professeur étudiant. C'était également lui qui l'avait entraîné dans le bureau du maire pour le vandaliser et ensuite prétendre qu'ils s'étaient échappé de la réception pour s'adonner à une petite partie de jambes en l'air vite fait. Et maintenant, de le tenir si près de lui, c'était en faire trop? Un sourire amusé apparaît sur le visage de Ji Soo.

Il est déjà un peu trop tard pour ça.

De toute façon, David ne fait rien pour l'éloigner alors il a sans doute accepté cette proximité. Ils se dirigent vers la sortie, le peu de gens qu'ils croisent ne semblant pas particulièrement choqués par la vue des deux hommes si près l'un de l'autre. Le monde change, Ji Soo le voit bien malgré l'aspect conservateur de l'industrie littéraire.

Enfin, ils arrivent à la voiture et David en profite pour l'aviser de ne pas prendre goût à ce qui se passe, ce qui amuse davantage Ji Soo.

Tu risques d'y prendre goût aussi, David. Après tout, c'est à moi à qui tu as fait appel pour m'occuper de toi pendant que tu te remets de ta blessure. Ça implique une certaine intimité...

Il s'interrompt, entendant une voix interpeller David. Instinctivement, Ji Soo se retourne, lui aussi, apercevant un homme qu'il n'avait pas encore rencontré jusqu'à présent. Il ne s'éloigne pourtant pas du professeur, jouant le jeu jusqu'au bout alors qu'il referme même sa main un peu plus fermement sur sa taille.

Moi ? Y prendre goût ? Jamais de la vie ! Même si avec tout ça, j’avais presque oublié la proposition que je lui ai fait en début de soirée. Vivre avec moi pour les prochains jours pour m’aider au quotidien et je vais en avoir besoin vu l’état dans lequel se trouve mon bras. Est-ce qu’au fond c’est une bonne idée ? Il est trop tard pour se poser cette question. Quant à ce que tout ça me coûtera, je ne préfère pas y penser pour le moment. De toute façon pour les prochaines minutes, j’ai bien mieux à faire puisque mon éditeur nous rejoint près de ma voiture.

Nous nous saluons et puis soudain, son regard se pose sur Jisoo et cette main qui est posée là où elle ne devrait pas. Je vois bien qu’il est surpris pour ne pas dire choqué. Je semblais inconsolable après mon divorce et me voilà en compagnie d’un jeune homme. C’est juste à peine croyable pour ne pas dire irréelle.
« Je vais vous présenter. Marc, je te présente Jisoo. Jisoo, Marc est mon éditeur. »
Puis me tournant vers Marc :
« Je t’enverrais prochainement une ébauche de mon prochain manuscrit. J’ai été assez occupé dernièrement. »
Parce qu’un jeune homme a déboulé dans ma vie sans crier gare ? C’est un peu ça mais les moments que nous avons passé ensemble étaient loin d’être passionnés et érotiques. Bien au contraire, je dois me faire violence pour ne pas m’essayer au crime parfait. D’expérience de romancier, ça n’existe pas et puis je ne suis pas certain d’être capable de vivre avec un meurtre sur la conscience.

Après m’être éclairci la gorge, je lui montre mon bras blessé comme pour détourner son attention et ajoute aussitôt :
« Jisoo m’aidera vu l’état dans lequel je suis. C’est une stupide chute à cheval. Mais, je t’appelle dans la semaine promis. »
J’essaie d’écourter autant que possible cet échange et pourtant, je me doute que Jisoo doit être particulièrement intéressé par cette rencontre. Après tout, Marc est mon éditeur mais rien ne sert de lui sauter dessus tout de suite s’il n’a même pas un manuscrit potable à lui soumettre même si quelque chose me dit que nous allons y travailler très prochainement. D’ailleurs pour être certain que Jisoo ne soit pas tenté de prolonger cette rencontre, j’ajoute à l’intention de mon éditeur :
« Je te parlerais à cette occasion de ce que fait Jisoo. Ça pourrait peut-être t’intéresser. »
Il ne peut pas savoir ce que ça me coute de dire ça. D’autant plus que je n’ai aucune garanti que Jisoo ne me balancera pas lorsqu’il aura eu ce qu’il voudra.

Ji Soo s'amuse du regard que pose l'homme sur eux alors qu'il semble à la fois décontenancé et complètement choqué. Il doit bien connaître David après tout et, le voir si près d'un étudiant doit être surprenant, surtout que leur proximité ne laisse que très peu de place au doute. Sans retirer sa main, le coréen se contente d'incliner légèrement la tête lorsque le professeur fait les présentations, comprenant mieux la relation qui unie les deux hommes. Discrètement, J
i Soo glisse sa main tenant le sac en papier derrière son dos, espérant ne pas attirer le regard curieux de Marc sur celui-ci.

Enchanté, David est mon directeur de mémoire.

Un sourire innocent aux lèvres, il tourne la tête vers David lorsque ce dernier parle de son manuscrit, se demandant pour quelle raison son éditeur viendrait l'embêter pour cette raison dans une telle soirée. Ils devaient se parler fréquemment au téléphone, était-ce nécessaire? Ou peut-être était-ce la blessure de David qui l'avait inquiété, ce qui était plus plausible. D'ailleurs, ce dernier ne tarde pas à lui donner une explication avant de suivre en parlant du travail de Ji Soo. Son sourire s'aggrandit davantage alors qu'il resserre sa main autour du professeur.

Ce serait un honneur que vous puissiez un jour lire ce que je fais. David n'est pas très satisfait avec mon travail mais il m'a promis de m'aider à atteindre un meilleur niveau. Il voit sans doute un certain potentiel...